Première réunion du Groupe, à l’hôtel Bilderberg (1954)
Chaque année, depuis 1954, une centaine des plus
éminentes personnalités d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord se
réunissent —à huis clos et sous très haute protection— au sein du Groupe
de Bilderberg. Leur séminaire dure trois jours et rien ne transparait
de leurs débats.
Depuis la dislocation de l’Union soviétique, des journalistes se sont
intéressés à cette organisation élitiste et secrète. Certains auteurs y
ont vu un embryon de gouvernement mondial et lui attribuent les
principales décisions politiques, culturelles, économiques et militaires
de la seconde moitié du XXe siècle. Une interprétation qu’a relayée
Fidel Castro, mais que rien n’est venue confirmer, ni infirmer.
Pour savoir ce qu’est ou n’est pas le Groupe de Bilderberg, j’ai
cherché des documents et des témoins. J’ai eu accès à l’intégralité de
ses archives pour la période 1954-1966 et à de nombreuses pièces
ultérieures, et j’ai pu discuter avec un de ses anciens invités que je
connais de très longue date. Aucun journaliste à ce jour, et
certainement pas les auteurs à succès qui ont popularisé les clichés
actuels, n’a eu accès à tant de documents internes du Bilderberg.
Voici ce que j’ai découvert et compris.
La première réunion
70 personnalités, issues de 12 pays, participent à la première
réunion du Groupe. C’est un séminaire de trois jours, du 29 au 31 mai
1954, près d’Arnhem (Pays-Bas). Les invités sont répartis dans deux
autres hôtels avoisinants, mais les débats se tiennent dans
l’établissement principal qui donna son nom au Groupe.
Les invitations, à en-tête du Palais de Soestdijk, sont sybillines. : « J’apprécierais
vivement votre présence au congrès international, sans caractère
officiel, qui se tiendra aux Pays-Bas vers la fin du mois de mai. Ce
congrès désire étudier un certain nombre de questions d’une grande
importance pour la civilisation occidentale et a pour but de stimuler le
goodwill et l’entente réciproque grâce à un libre échange de vues ».
Elles sont signées du prince consort des Pays-Bas, Bernhard zur
Lippe-Biesterfeld, et accompagnées de quelques pages d’informations
administratives sur le transport et l’hébergement. Tout au plus y
apprend-on que les délégués seront issus des États-Unis et de 11 États
ouest-européens, et que 6 séances de travail de 3 heures chacune sont
prévues.
Vu le passé nazi du prince Bernhard (qui avait servi dans la
cavalerie SS jusqu’à son mariage en 1937 avec la princesse Juliana) et
dans le contexte du McCarthysme, il est clair que les « questions d’une grande importance pour la civilisation occidentale » tournent autour de la lutte contre le communisme.
Une fois arrivé sur place, l’impression des invités est tempérée par
les deux présidents de séance : l’entrepreneur états-unien John S.
Coleman et le ministre belge sortant des Affaires étrangères Paul van
Zeeland. Le premier est un militant du libre-échange, le second est un
partisan de la Communauté européenne de Défense (CED) [
1].
Enfin, on aperçoit en bout de tribune Joseph Retinger, l’éminence grise
des Britanniques. Tout cela laisse à penser que les monarchies
hollandaise et britannique ont sponsorisé cette réunion pour soutenir la
Communauté européenne de Défense et le modèle économique du capitalisme
libre-échangiste face à l’anti-américanisme que promeuvent communistes
et gaullistes.
Cependant, les apparences sont trompeuses. Il ne s’agit pas de faire
campagne pour la CED, mais de mobiliser les élites pour la Guerre
froide.
S.A.R. le prince Bernhard a été choisi pour convoquer ce congrès
parce que son statut de prince consort lui donne un caractère étatique
sans pour autant être officiel. Il masque le commanditaire : une
organisation inter-gouvernementale qui entend manipuler les
gouvernements de certains de ses États membres.
John S. Coleman n’est pas encore le président de la Chambre de
Commerce des États-Unis, mais il vient de créer le Comité des citoyens
pour une politique nationale du Commerce (Citizen’s Committee for a National Trade Policy
— CCNTP). Selon lui, le libre-échange absolu, c’est-à-dire le
renoncement à tous les droits de douane, permettra aux pays alliés des
États-Unis d’accroître leur richesse et de financer la Communauté
européenne de Défense (c’est-à-dire de réarmer l’Allemagne et d’intégrer
sa puissance militaire potentielle au sein de l’OTAN)
Or, les documents en notre possession montrent que le CCNTP n’a de
citoyen que le nom. C’est en réalité une initiative de Charles D.
Jackson, le conseiller en guerre psychologique de la Maison-Blanche.
L’opération est pilotée en amont par William J. Donovan, l’ancien
commandant de l’OSS (le service de renseignement US durant la guerre)
désormais chargé d’édifier la branche américaine du nouveau service
secret de l’OTAN, le Gladio [
2].
Paul van Zeeland n’est pas seulement le promoteur de la Communauté
européenne de Défense, c’est aussi un politicien de grande expérience. À
la Libération, il a présidé la Ligue indépendante de coopération
européenne (LICE) dont l’objectif est de créer une union douanière et
monétaire. Cette organisation a été mise en place par Joseph Retinger,
déjà cité.
Précisément Retinger, qui fait office de secrétaire du congrès de
Bilderberg, a servi durant la guerre dans les services secrets anglais
(SOE) du général Colin Gubbins. Aventurier polonais, Retinger s’est
retrouvé conseiller du gouvernement Sikorski en exil au Royaume-Uni. À
Londres, il a animé le microsome des gouvernements en exil se faisant
ainsi le plus beau carnet d’adresse de l’Europe libérée.
Son ami Sir Gubbins a officiellement quitté le service et le SOE a
été dissout. Il dirige une petite entreprise de tapis et textiles, qui
lui sert de « couverture ». En réalité, aux côtés de son
homologue Donovan, il est chargé de créer la branche anglaise du Gladio.
Il a participé à toutes les réunions préparatoires du congrès de
Bilderberg et est présent parmi les invités, assis à côté de Charles D.
Jackson.
À l’insu des participants, ce sont donc les services secrets de
l’OTAN qui sont la puissance invitante. Bernhard, Coleman et van Zeeland
servent de paravents.
N’en déplaise aux journalistes imaginatifs qui ont cru discerner dans
le Bilderberg une volonté de créer un gouvernement occulte mondial, ce
club de personnalités influentes n’est qu’un outil de lobbying de l’OTAN
pour la promotion de ses intérêts. C’est beaucoup plus sérieux et
beaucoup plus dangereux, car c’est l’OTAN qui ambitionne d’être un
gouvernement occulte mondial garantissant la pérennité du statu quo international et de l’influence US.
D’ailleurs, la sécurité de chaque réunion ultérieure ne sera pas
assurée par la police du pays hôte, mais par les soldats de l’Alliance.
Parmi les dix orateurs inscrits, on relève deux anciens Premiers
ministres (Guy Mollet, France et Alcide de Gasperi, Italie), trois
responsables du Plan Marshall, le faucon de la Guerre froide (Paul H.
Nitze) et surtout un très puissant financier (David Rockefeller).
Selon les documents préparatoires, une vingtaine de participants sont
dans la confidence. Ils savent plus ou moins en détail qui sont les
tireurs de ficelles et ont rédigé à l’avance leurs interventions. Les
moindres détails ont été ajustés et il n’y a aucune part
d’improvisation. Au contraire, la cinquantaine d’autres participants
ignore tout de ce qui se trame. Ils ont été choisis pour influencer
leurs gouvernements respectifs et l’opinion publique de leur pays. Le
séminaire est donc organisé pour les convaincre et pour les pousser à
s’engager à propager les messages que l’on veut diffuser.
Les interventions ne portent pas sur les grands problèmes
internationaux, mais analysent la stratégie idéologique supposée des
Soviétiques et exposent la manière dont elle doit être contrée dans le
« monde libre ».
Les premières interventions évaluent le danger communiste. Les « communistes conscients »
sont des individus qui entendent placer leur patrie au service de
l’Union soviétique afin d’imposer au monde un système collectiviste. Ils
doivent être combattus. Mais cette lutte est difficile car ces « communistes conscients »
sont noyés en Europe dans une masse d’électeurs communistes qui
ignorent tout de leurs sombres desseins et les suivent dans l’espoir de
meilleures conditions sociales.
Progressivement, la rhétorique se durcit. Le « monde libre » doit affronter le « complot communiste mondial »,
non seulement de manière générale, mais aussi en répondant à des
questions concrètes sur les investissements états-uniens en Europe ou
sur la décolonisation.
Enfin, les orateurs en arrivent au problème principal —que les
Soviétiques, assurent-ils, exploitent à leur profit— : pour des raisons
culturelles et historiques, les responsables politiques du « monde libre »
emploient des arguments différents aux États-Unis et en Europe,
arguments qui se contredisent parfois. Le cas le plus emblématique est
celui des purges organisées par le sénateur McCarthy aux États-Unis.
Elles sont indispensables pour sauver la démocratie, mais la méthode
choisie est ressentie en Europe comme une forme de totalitarisme.
Le message final, c’est qu’aucune négociation diplomatique, aucun compromis n’est possible avec les « Rouges ».
Il faut empêcher coûte que coûte les communistes de jouer un rôle en
Europe occidentale, mais il va falloir ruser : comme on ne peut pas les
arrêter et les fusiller, il faudra les neutraliser avec discrétion, sans
que leurs électeurs eux-mêmes s’en rendent compte. Bref, l’idéologie
qui est développée, c’est celle de l’OTAN et du Gladio. Il n’a jamais
été dit que l’on truquerait les élections, ni que l’on assassinerait les
tièdes, mais tous les participants ont admis que pour sauver le « monde libre », il faudrait mettre la liberté entre parenthèses.
Bien que le projet de Communauté européenne de Défense (CED) ait
échoué trois mois plus tard sous les coups de boutoir des députés
communistes et « nationalistes extrémistes » (c’est-à-dire
gaullistes) au Parlement français, le congrès fut considéré comme un
succès. Malgré les apparences, il n’avait pas pour but de soutenir la
création de la CED ou toute autre mesure politique précise, mais de
diffuser une idéologie dans la classe dirigeante, puis à travers elle
dans la société. Objectivement, les Européens de l’Ouest avaient de
moins en moins conscience des libertés dont ils étaient privés et ils
étaient de plus en plus informés des libertés qui faisaient défaut aux
habitants de l’Europe de l’Est.
Le Bilderberg devient une organisation
Un second congrès est donc organisé en France, du 18 au 20 mars 1955. À Barbizon.
Progressivement l’idée que ces congrès seront annuels et qu’ils
nécessitent un secrétariat permanent s’impose. Le prince Bernhard se met
en retrait lorsqu’il est pris en flagrant délit de trafic d’influence
(scandale Lockheed-Martin). Il cède à l’ancien Premier ministre
britannique Alec Douglas Home (1977-80), la présidence qui sera ensuite
tenue par l’ancien chancelier et président allemand Walter Scheel
(1981-85), l’ancien gouverneur de la Banque d’Angleterre Eric Roll
(1986-89), l’ancien secrétaire général de l’OTAN Peter Carrington
(1990-98), et enfin l’ancien vice-président de la Commission européenne
Étienne Davignon (depuis 1999).
Pendant longtemps, le président du Groupe de Bilderberg est assisté
de deux secrétaires généraux, un pour l’Europe et le Canada (les États
vassaux), l’autre pour les États-Unis (le suzerain), cependant, il n’y a
plus qu’un seul secrétaire général depuis 1999.
D’une année sur l’autre, les débats sont très redondants, c’est
pourquoi les invités changent. Il y a toujours un noyau dur qui a
préparé le séminaire à l’avance et des nouveaux venus à qui l’on
inculque la rhétorique atlantiste du moment.
Actuellement, les séminaires annuels rassemblent plus de 120
participants, dont toujours un tiers forment le noyau dur. Ils ont été
sélectionnés par l’Alliance en fonction de l’importance de leurs
relations et de leur capacité d’influence, indépendamment de leurs
fonctions dans la société. Ainsi, ils restent membres du noyau dur
lorsqu’ils changent de métier.
Voici la liste exacte de ce noyau dur, incluant les membres du
Conseil d’administration, qui servent de devanture pour les invités, et
des membres moins visibles pour ne pas effaroucher les nouveaux venus.
- Étienne Davignon, secrétaire général du Groupe de Bilderberg
Conseil d’administration
Josef Ackermann |
Banquier suisse, directeur de la Deutsche Bank, vice-président du Forum de Davos. |
Roger C. Altman |
Banquier états-unien, ancien conseiller des campagnes électorales de
John Kerry et Hillary Clinton, directeur de la banque d’affaire
Evercore Partners Inc. |
Francisco Pinto Balsemão |
Ancien Premier ministre socialiste du Portugal (1981-83),
président-fondateur du plus important groupe de télévision portugais
SIC. (T) |
Fran Bernabè |
Banquier italien, actuel patron de Telecom Italia (T) |
Henri de Castries |
Pdg de l’assureur français AXA |
Juan Luis Cebrián |
Directeur du groupe de presse écrite et audiovisuel espagnol Prisa. |
W. Edmund Clark |
Banquier canadien, PDF de Toronto-Dominion Bank Financial Group |
Kenneth Clarke |
Ancien vice président de British American Tobacco (1998-2007), Garde
des sceaux et ministre britannique de la Justice, vice-président du
Mouvement européen UK. |
George A. David |
Pdg de Coca-Cola. |
Étienne Davignon |
Homme d’affaire belge, ancien vice-président de la Commission européenne (1981-85), actuel vice-président de Suez-Tractebel. |
Anders Eldrup |
Pdg de la société danoise des gaz et pétrole DONG Energy. |
Thomas Enders |
Directeur d’Airbus. |
Victor Halberstadt |
Professeur d’économie à l’université néerlandaise de Leiden, il
conseille diverses sociétés telles que Goldman Sachs ou
Daimler-Chrysler. |
James A. Johnson |
Financier états-unien, il fut un des principaux responsables du
Parti démocrate et un des artisans de l’investiture de Barack Obama. Il
est vice-président de la banque d’affaire Perseus. |
John Kerr of Kinlochard |
Ancien ambassadeur du Royaume-Uni à Washington, vice-président du groupe pétrolier Royal Dutch Shell (T) |
Klaus Kleinfeld |
Pdg allemand du géant états-unien de l’aluminium, Alcoa. |
Mustafa V. Koç |
Pdg de la holding Koç, première entreprise turque. |
Marie-Josée Drouin-Kravis |
Éditorialiste économique dans la presse écrite et audiovisuelle
canadienne. Chercheuse au très militariste Hudson Institute. Elle est la
troisième épouse de Henry Kravis. |
Jessica T. Mathews |
Ancienne directrice des affaires globales au Conseil de sécurité
nationale des Etats-Unis. Actuelle directrice de la Fondation Carnegie. |
Thierry de Montbrial |
Économiste, directeur-fondateur de l’Institut français des relations internationales (IFRI) et de la World Policy Conference. |
Mario Monti |
Économiste italien, ancien commissaire européen à la concurrence
(1999-2005), co-fondateur du Spinelli Group pour le fédéralisme
européen. |
Egil Myklebust |
Ancien président du patronat norvégien, directeur de Scandinavian Airlines System (SAS). |
Matthias Nass |
Directeur adjoint du quotidien allemand Die Zeit |
Jorma Ollila |
Homme d’affaire finlandais, ancien Pdg de Nokia, actuel président du groupe pétrolier Royal Dutch Shell. |
Richard N. Perle |
Ancien président du Conseil consultatif de Défense du Pentagone, il
est un des principaux leaders des Straussiens (les disciples de Leo
Strauss) et à ce titre, une figure majeure du néo-conservatisme. |
Heather Reisman |
Femme d’affaire canadienne, Pdg du groupe d’édition Indigo-Chapters. |
Rudolf Scholten |
Ancien ministre autrichien des Finances, gouverneur de la Banque centrale. |
Peter D. Sutherland |
Ancien commissaire européen irlandais à la concurrence, puis
directeur général de l’Organisation mondiale du Commerce.Ancien
directeur de BP. Actuel président de Goldman Sachs International. Ancien
président de la section européenne de la Commission trilatérale, et
vice-président de l’European Round Table of Industrialists, actuel
président d’honneur du Mouvement européen Irlande. |
J. Martin Taylor |
Ancien député britannique, Pdg du géant de la chimie et de l’agroalimentaire Syngenta. |
Peter A. Thiel |
Chef d’entreprise états-unien, Pdg de PayPal, président de Clarium Capital Management et à ce titre actionnaire de Facebook. |
Daniel L. Vasella |
Pdg du groupe pharmaceutique suisse Novartis. |
Jacob Wallenberg |
Banquier suédois, il est administrateur de nombreuses compagnies transnationales. |
- Henry Kissinger, principal responsable des invitations au Groupe de Bilderberg
Membres cachés du noyau dur
Carl Bildt |
Ancien Premier ministre libéral de Suède (1991-94), ancien envoyé
spécial de l’Union européenne puis de l’ONU dans les Balkans (1995-97,
1999-2001), actuel ministre suédois des Affaires étrangères. (T) |
Oscar Bronner |
Pdg du quotidien autrichien Der Standard. |
Timothy C. Collins |
Financier états-unien, directeur du fond de placement Ripplewood. (T) |
John Elkann |
PDG du groupe italien d’automobile Fiat (son grand-père Gianni
Agnelli fut pendant quarante ans un des animateurs du Groupe de
Bilderberg. Il a hérité de la fortune familiale après le décès de mort
naturelle de son grand-père Giovanni et la mort prématurée de son oncle
Edoardo. Cependant, des sources policières sont convaincues que Edoardo a
été assassiné après qu’il se soit converti à l’islam chiite, de sorte
que la fortune revienne à la branche juive de la famille). |
Martin S. Feldstein |
Ancien conseiller économique de Ronald Reagan (1982-84), et actuel
conseiller économique de Barack Obama. Il a aussi été conseiller de
George W. Bush pour le Renseignement extérieur. Il enseigne à Harvard.
(T) |
Henry A. Kissinger |
Ancien conseiller de sécurité nationale des Etats-Unis et secrétaire
d’Etat, personnalité centrale du complexe militaro-industriel US,
actuel président de la société de conseil Kissinger Associates. |
Henry R. Kravis |
Financier états-unien gestionnaire du fond de placement KKR. Il est un des principaux collecteurs de fonds du Parti républicain. |
Neelie Kroes |
Ancienne ministre néerlandaise libérale des Transports, commissaire
européenne à la concurrence, et actuelle commissaire à la société
numérique. |
Bernardino Léon Gross |
Diplomate espagnol, secrétaire général de la présidence du gouvernement socialiste de José-Luis Zapatero. |
Frank McKenna |
Ancien membre de la Commission de surveillance des services de
renseignement canadiens, ambassadeur du Canada à Washington (2005-06),
vice-président de la Banque Toronto-Dominion. |
Beatrix des Pays Bas |
Reine de Hollande. Elle est la fille du prince Bernhard. |
George Osborne |
Ministre britannique des Finances. Ce néo-conservateur est considéré
comme un eurosceptique. Il faut comprendre par là qu’il est opposé à la
participation du Royaume-Uni à l’Union européenne, mais qu’il est
partisan de l’organisation du continent au sein de l’Union. |
Robert S. Prichard |
Économiste canadien, directeur du groupe de presse écrite et audiovisuelle Torstar. |
David Rockefeller |
Le patriarche d’une longue lignée de financiers. Il est le plus
ancien membre du noyau dur des Bilderbergers. Il est également le
président de la Commission Trilatérale, une organisation similaire
intégrant des participants asiatiques. |
James D. Wolfensohn |
Financier australien ayant pris la nationalité états-unienne pour
devenir président de la Banque mondiale (1995-2005), aujourd’hui
directeur du cabinet conseil Wolfensohn & Co. |
Robert B. Zoellick |
Diplomate états-unien, ancien délégué au Commerce des États-Unis (2001-05), actuel président de la Banque mondiale. |
- David Rockefeller, conseiller du Groupe de Bilderberg
Les Bilderbergers n’engagent pas les entreprises ou institutions dans
lesquelles, ils travaillent. Cependant, il est intéressant d’observer
la diversité de leurs secteurs d’activité.
Le lobby de la plus puissante organisation militaire mondiale
Au cours des dernières années, le nombre de sujets abordés lors des
séminaires annuels a augmenté en fonction de l’actualité internationale.
Mais cela ne nous apprend rien, car ces discussions n’ont aucun objet
en elles-mêmes, elles sont juste des prétextes pour faire passer des
messages. Malheureusement, nous n’avons pas eu accès aux documents
préparatoires les plus récents et ne pouvons que supputer sur les mots
d’ordre que l’OTAN s’efforce de diffuser via ces leaders d’opinion.
La réputation du Groupe de Bilderberg a conduit certains auteurs à
lui attribuer des capacités de nomination. C’est stupide et cela masque
les vrais tireurs de ficelles qui se trouvent au sein de l’Alliance
atlantique.
Par exemple, on a rapporté que durant la dernière campagne électorale
présidentielle aux États-Unis, Barack Obama et Hillary Clinton ont
disparu durant une journée, le 6 juin 2008, pour négocier à l’écart la
fin de leur rivalité. Ils se sont en réalité rendus au séminaire annuel
du Groupe de Bilderberg, à Chantilly (Virginie, USA). Or, le lendemain,
Mme Clinton annonçait qu’elle se retirait de la course. Certains auteurs
en ont conclu que la décision a été prise au cours de la réunion du
Bilderberg. Ce n’est pas logique, dans la mesure où cette décision était
certaine depuis trois jours vu le nombre de voix du sénateur Obama au
sein du comité d’investiture du Parti démocrate.
Selon notre source, c’est autre chose qui s’est passé. Barack Obama
et Hillary Clinton ont conclu à l’écart un accord financier et
politique. Le sénateur Obama a renfloué les caisses de sa rivale et lui a
offert un poste dans son administration (Mme Clinton a refusé la
vice-présidence et a choisi le département d’État) en échange de son
soutien actif durant la campagne contre le candidat républicain. Puis,
les deux leaders ont été introduits par James A. Johnson au séminaire du
Bilderberg où ils ont assuré les participants qu’ils travailleraient
ensemble. Depuis longtemps déjà, Barack Obama était le candidat de
l’OTAN. M. Obama et sa famille ont toujours travaillé pour la CIA et le
Pentagone [
3].
De plus, les premiers financements de sa campagne ont été fournis par
la Couronne d’Angleterre via l’homme d’affaire Nadhmi Auchi. En
présentant le sénateur noir aux Bilderbergers, l’Alliance atlantique
organisait à l’échelle internationale les relations publiques du futur
président des États-Unis.
De même, on a rapporté que le Groupe de Bilderberg a organisé un
dîner impromptu, hors séminaire, le 14 novembre 2009 au Château de Val
Duchesse, propriété du roi de Belgique. L’ancien Premier ministre belge
Herman von Rompuy y a prononcé un discours. Or, cinq jours plus tard, il
fut élu président du Conseil européen. Là encore, certains auteurs en
on conclu à tort que le Groupe de Bilderberg était le « faiseur de roi ».
En réalité, le président de l’Union européenne ne pouvait pas être
choisi en dehors des cercles de l’OTAN, puisque —rappelons-le— l’Union
européenne est issue des clauses secrètes du Plan Marshall. Et ce choix
devait être avalisé par les États membres. Ce type de décision nécessite
de longues négociations et ne se prend pas lors d’un dîner entre amis.
Toujours selon notre source, le président du Groupe de Bilderberg,
Étienne Davignon, a convoqué ce dîner exceptionnel pour présenter van
Rompuy à ses relais d’influence. La chose était d’autant plus
indispensable que la première personnalité à occuper la nouvelle
fonction de président de l’Union était totalement inconnue en dehors de
son pays. Au cours du repas, M. Van Rompuy a exposé son programme de
création d’un impôt européen pour financer directement les institutions
de l’Union sans passer par les États membres. Il restait aux
Bilderbergers à clamer partout où ils le pouvaient qu’ils connaissent
Herman von Rompuy et attestent de ses qualités pour présider l’Union.
La réalité du Groupe de Bilderberg est donc moins romantique que
certains auteurs à succès l’ont imaginée. L’incroyable déploiement de
forces militaires pour assurer sa sécurité n’a pas tant pour objet de le
protéger que d’impressionner ceux qui y participent. Il ne manifeste
pas leur puissance, mais leur montre que la seule vraie puissance en
Occident, c’est l’OTAN. Libre à eux de la soutenir et d’être appuyés par
elle, ou de la combattre et d’être inexorablement écrasés.
En outre, bien que le Groupe de Bilderberg ait développé à ses débuts
une rhétorique anti-communiste, il n’était pas tourné contre l’URSS et
n’est pas aujourd’hui tourné contre la Russie. Il suit la stratégie de
l’Alliance qui n’est pas un Pacte contre Moscou, mais pour la défense
—et éventuellement l’extension— de la zone d’influence de Washington. À
sa création, l’OTAN avait espéré intégrer l’Union soviétique, ce qui
aurait équivalu à un engagement de Moscou de ne pas remettre en cause le
partage du monde issu des conférences de Postdam et de Yalta. Récemment
l’Alliance a accueilli le président Dmitry Medvedev au sommet de
Lisbonne et lui a proposé que la Russie se joigne à elle. Il ne
s’agirait pas alors d’une vassalisation, mais de la reconnaissance du
Nouvel Ordre Mondial, dans lequel toute l’Europe centrale et orientale
est passée dans l’orbite états-unienne. Une adhésion russe vaudrait en
quelque sorte traité de paix : Moscou reconnaitrait sa défaite dans la
Guerre froide et le nouveau partage du monde.
Dans ce cas, le Groupe de Bilderberg inviterait des personnalités
russes à ses réunions annuelles. Il ne leur demanderait pas d’influer
l’opinion publique russe pour l’américaniser, mais pour la convaincre de
renoncer définitivement aux rêves de grandeur du passé.